Gilets jaunes : les promesses de Macron

Soyez rassurés, je n’ai pas l’intention de m’étendre comme la Presse et les médias de l’audio visuel l’ont fait depuis 48 heures sur le détail des nombreuses promesses du Président. Je me limiterai donc à la portée de son discours et à l’évocation de quelques propositions qui méritent qu’on s’y attarde.

Observation préliminaire, les gilets jaunes ont réussi en un mois à obtenir plus que les syndicats réunis ces dernières années. Il y a là de quoi marquer un arrêt pour essayer de comprendre ce phénomène jusque-là jamais observé.

Première remarque, nombre de mesures annoncées ont un caractères précaire c’est à dire qu’elles n’offrent aucune garantie de durée. Elles sont donc révocables et, la plupart au bout d’un an. Parmi celles-ci, un premier groupe apparait clairement. Il comprend le gel des augmentations des carburants, du gaz, de l’électricité, des agios bancaires et de la limite à 25 euros du maximum de ces agios réclamés aux plus démunis. Au passage, est-il nécessaire de préciser que 25 euros constituent une somme importante pour des gens sans ressources dès le 15 du mois. Un grand merci donc aux banquiers pour ce geste altruiste qui va les priver de plusieurs dizaines de millions d’euros en 2019. Autre mesure mais qui concerne les entreprises, l’attribution d’une prime exceptionnelle de fin d’année qui, de par son caractère justement unique ne s’inscrit pas dans la durée. En outre, cette prime ne sera versée qu’aux personnels des entreprises qui en ont les moyens. Combien de personnes en bénéficieront-elles  ? Pour information, Total annonce qu’il va verser 500€ à tous ses salariés de France. Grand pollueur mais aussi  payeur débonnaire.  

Un deuxième groupe de mesures présente un caractère aléatoire (qui va précisément en profiter ?) et non universel (qui sera exclu ?). On se demande aussi comment elles vont s’installer dans le temps. Ce sont précisément celles se rapportant au SMIC – étroitement lié à la prime d’activité – à l’exemption de la hausse de la CSG pour les retraités (qui s’appliquera auxquels d’entre eux, s’il faut attendre l’élaboration de barèmes ?) et à la défiscalisation des heures supplémentaires attendue dans quelques domaines comme celui de la restauration.

S’il était impossible de satisfaire trois pages de « revendications jaunes » il faut noter que dans son discours Macron a passé à la trappe des mesures attendues aussi par les automobilistes (1) , par les tenants d’une plus grande justice sociale et fiscale et par ceux qui prônent de longue date une plus juste représentativité du peuple dans les prises de décisions tant au niveau local que national. Ces demandes reviendront peut-être sur la table à l’occasion des réunions de concertation prévues les trois prochains mois dans le programme Macron (2).

Bien malin donc celui qui aujourd’hui, et même demain, pourra dire quels seront les vrais bénéficiaires ou les exclus de ces mesures commentées à tout va et à la va-vite par les médias. Si on peut effectivement s’interroger sur les réels bénéficiaires, en revanche on sait déjà quels seront les perdants. Notamment tous ceux qui seront au-dessus ou au-dessous des limites fixées par les barèmes et aussi les chômeurs, les précaires, les bas salaires, les indépendants, les fonctionnaires de catégorie C, les pauvres et d’autres que je dois oublier, au total, ils seront bien plus nombreux que les « favorisés ».

Au final, après ces mesures, rien de surprenant que les Gilets jaunes poursuivent leur mouvement malgré le contexte d’attentat et les exhortations de la Presse et du gouvernement.

Je souhaite clore ce billet comme je l’ai débuté en me voulant rassurant mais cette fois à l’attention de toutes celles et ceux qui, comme les médias depuis ce matin, s’inquiètent, voire s’indignent en constatant le coût faramineux de ces mesures, estimé à la louche, entre 10 et 14 milliards d’euros. Cette somme chers lecteurs sera simplement ajoutée à la dette du pays pour la plus grande joie des banquiers qui s’enrichissent avec les intérêts qu’elle rapporte, et de celle des politiques qui, grâce à elle, justifient les impôts et taxes qu’ils nous infligent.

L’acte V  prévu samedi prochain, malgré les dangers de dérapages, risque de s’apparenter à un baroud d’honneur. Si les Gilets jaunes finissent par abandonner, Macron s’en sortira sans trop de dommages mais il lui faudra dorénavant se méfier d’une nouvelle marée jaune en cas de nouvelles exaspérations du peuple, je pense entre autre à la révision de la Constitution et surtout à celle des régimes de retraite.

(1) Retour aux 90 Km/h sur certaines routes, réduction des augmentations prévues à la fois pour le contrôle technique et le stationnement, compensation de l’effondrement de la valeur de revente des véhicules Diesel… (2) une mesure intéressante et de nature à changer la donne des élections a été évoquée lors du discours présidentiel et passée sous silence par les médias. Je veux parler de la prise en compte du vote blanc qui pourrait inciter de nombreux abstentionnistes à revenir vers les bureaux de vote. L’avenir nous dira s’il s’agissait d’une proposition en l’air.

Photo : http://www.femmesnews.com/wp-content/uploads/2018/12/Gilets-jaunes-Le-discours-de-Macron-en-debut-de-semaine-696×391

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3 commentaires

  1. A un moment ou le père Noël pourrait nous envoyer une réforme des retraites, surtout scandaleuse pour nos générations futures, il me semble nécessaire de regarder en haut, en particulier ces gens qui nous demandent de faire des efforts. J’avoue que ma brave Maman n’avait que 900 euros par mois après s’être cassé le dos au bout de 42 ans de labeur et encore elle n’avait pas de loyer, cette petite chose qui fait la différence entre une vie simple et la pauvreté. Promis, juré, plutôt que de m’enfermer dans des bateaux noirs durant 20 ans et bien dans ma prochaine vie je serai fonctionnaire européen.

    https://bfmbusiness.bfmtv.com/monde/un-fonctionnaire-europeen-gagne-6-500-euros-nets-mois-653250.html

  2. Effectivement, il ne servirait à rien de changer le Premier ministre et/ou le Président si c’est pour continuer le même type de politique ultralibérale, au bénéfice de quelques privilégiés. C’est exactement ce qui s’est passé avec Sarkozy et Hollande, puis maintenant avec Macron. Quant aux quelques mesures concédées au mouvement citoyen des gilets jaunes, même à hauteur de 10 milliards d’€, cela reste très peu en regard des 20 milliards d’€ offerts aux plus riches sur le quinquennat. Pourquoi serait-il scandaleux d’accroître la dette pour améliorer les conditions de vie de la majorité de la population quand on gaspille le double pour une minorité qui n’en a pas vraiment besoin et qui pratique volontiers « l’optimisation fiscale ». Toutefois, cette affaire ne devrait pas en rester là et s’exporter plutôt en direction de Bruxelles afin d’obtenir les réformes nécessaires, notamment en matière de justice fiscale. C’est effectivement au niveau de l’Europe que la gouvernance doit évoluer vers plus de justice et d’égalité. Il y a urgence si l’on considère les extrémistes qui parviennent progressivement à porter de pouvoir dans plusieurs pays, parce ceux qui votent ou non aujourd’hui ne connaissent pas leur histoire récente.

  3. Tout est dit sous l’excellente signature de Coralie Delaume (Blog l’Arène nue), il ne sert à rien de changer notre président il faut changer la gouvernance de l’Europe qui contrôle la totalité de notre politique monétaire (BCE), 80 % environ des politiques agricoles, économiques et environnementales et beaucoup moins pour le social et le médical. Méfions nous des faiseurs de rêves qui nous poussent au FREXIT, nous ne serons fort qu’ensemble et l’ensemble des peuples doit pousser cette technostructure contrôlée par elle même à se réformer.

    http://www.lefigaro.fr/vox/politique/2018/12/06/31001-20181206ARTFIG00209-gilets-jaunes-macron-a-les-pieds-et-les-poings-lies-par-l-union-europeenne.php

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