COVID-19 : les contrôles aux frontières laissent à désirer

Pendant le confinement et au plus fort de la pandémie, les autorités ont annoncé la fermeture de nos frontières pour enrayer la propagation du COVID-19. Elles ont été précédées et suivies par plusieurs pays européens. Les états, avec l’abandon provisoire des frontières de l’Europe (Schengen), ont pu retrouver le temps de cette fermeture, leur souveraineté que l’Europe justement leur avait retirée progressivement au fil des dernières décennies et des traités ratifiés, avec ou sans l’accord des peuples. La fermeture de nos frontières était donc censée endiguer la pandémie tout en bloquant, effet collatéral, un certain nombre de nos compatriotes dans des pays jugés empestés.

A l’instar de ces dispositions, tandis que la contamination dans le pays se poursuit progressivement entre compatriotes de tous âges, les autorités se sont de nouveau tournées vers l’étranger mais cette fois en ciblant les voyageurs qui passent par nos aéroports. Les dangereux sont désormais celles et ceux qui proviennent de 16 pays figurant sur une liste rouge prédéterminée (Serbie, Algérie, Inde, Pérou, Turquie…) Les autres peuvent circuler sans problème.

Les « persona non grata » passant par Roissy ou ailleurs sont donc attendues par les policiers aux frontières (PAF) qui, à la demande du Premier ministre, ont mis en place « un dispositif de sécurité extrêmement important » c’est ce que nous rapporte le Canard enchaîné dans son édition du 12 août 2020. Si les voyageurs n’ont pas été testés à leur départ, ils sont orientés vers un barnum où ils se font « triturer les trous de nez ».

Malheureusement, si le dispositif se veut rigoureux, il y a des trous dans la raquette.

Le premier trou concerne les fameux pays de la liste rouge. Ils sont au nombre de 16 comme indiqués plus haut. Mais pourquoi 16 quand on sait pertinemment qu’il y en a d’autres qui pourraient mériter ce label peu enviable. La réponse est donnée par une note du directeur du centre interministériel de crise et datée du 30 juillet 2020 : « Compte tenu du nombre de passagers en provenance de pays « rouges », il a été décidé de concentrer nos moyens de contrôle sur les avions présentant le plus de risques sanitaires« . Les 16 pays ciblés sont donc « très rouges » et les autres « rouge clair ». 🙂

Deuxième trou: les contrôles effectués sur les pays « non rouges » ne concernent que les voyageurs qui ont pris un vol direct. Ceux qui se sont arrêtés en route à Francfort, Barcelone ou dans un autre pays européen, la PAF n’intervient pas ! Le ministère de l’intérieur avoue son impuissance et Beauvau de préciser : « Le Ministère de l’intérieur français n’a pas d’action de contrôle possible sur les voyageurs en provenance de l’intérieur de l’espace européen« . Défense de rire !

Troisième trou: les passagers munis d’une attestation de dépistage avant décollage ont peut-être brandi un faux ! On trouve aussi des petits malins à l’étranger. Un cadre de la sécurité à Roissy affirme :  » Vu les pays en question, c’est un jeu d’enfant de faire un faux. Moi je vous le fais en deux minutes chrono avec un faux logo et mon nom dessus« .

Quatrième trou: les caméras thermiques installées à Roissy et à Orly ne peuvent absorber le flux de passagers qui passent à toute allure devant ces caméras. Il est donc impossible de repérer tous ceux qui auraient de la température. Plus d’un million de passagers seraient passés depuis le 2 juin devant ces caméras et seuls « 34 personnes se sont révélées avoir une température de plus de 38 degrés« . Une visite médicale leur a été proposée pour se faire tester. Et après ?

Cinquième trou: une formalité « drastique » est imposée par les autorités à tous les passagers quelle que soit leur provenance : remplir à bord un formulaire (qui existait avant le COVID-19). Problème, les fiches qui doivent être remises par la compagnie au gestionnaire de l’aéroport et qui permettent éventuellement de tracer un positif, se perdent quand elles ne finissent pas dans une poubelle !

Je conclus en paraphrasant Jean Cocteau. « Puisque la situation nous dépasse, feignons d’en être les organisateurs« . Vieille tactique qui, on le voit, continue de prouver son efficacité.

Photo : https://information.tv5monde.com/info/surveillance-biometrique-et-covid-19-il-y-des-donnees-de-sante-et-de-biometrie-qui-sont