Retraites : « Qui sème le vent récolte la tempête »

Un minimum de bon sens et une surmédiatisation du sujet auront suffi à nos compatriotes (comme le disait si bien Jacques Chirac, pourtant européen convaincu) pour comprendre que le projet de report à 64 ans de l’âge de départ à la retraite n’avait pas pour objectif de renflouer les Caisses de retraites – lesquelles selon le COR (le Conseil d’Orientation des Retraites) pouvaient encore attendre – mais bien de réalimenter celles de l’État (déjà mal en point) très sollicitées par les aides Covid et celles attribuées aux premières victimes de l’inflation galopante. Pour s’en convaincre, si besoin était, contentons-nous d’observer l’unanimité (rare) des syndicats et celle des Français qui estiment à 70% l’injustice de la réforme et son rejet par 9 actifs sur 10.
Un tel consensus devrait donner à réfléchir à nos gouvernants plus attentifs aux sirènes d’alerte de Bruxelles – qui voit ses objectifs de déficit accordés aux états membres exploser – qu’aux cris de souffrance de la rue. Notre Première ministre (de Gauche) Élisabeth Borne dont la mollesse et l’apathie s’apparentent à un manque de conviction ainsi que le ministre du travail Olivier Dussopt (aussi de Gauche mais plus autant qu’avant – voir plus bas) (1) et peu à l’aise dans ses interventions, vus l’ampleur du mouvement déclenché le 7 mars 2023 et l’aggravation possible des mouvements, ont commencé à lâcher du lest sur divers points de la réforme qu’ils affirment pourtant «juste». Le problème est que les syndicats et le peuple rejettent cette réforme en bloc. Face au «Tout ou rien» s’engage un bras de fer dont l’issue reste très incertaine.
Devant cette situation le bas peuple a pensé, un moment, que ses représentants, les députés, allaient entendre sa voix. C’était compter sans les luttes d’égo que se livrent les multiples sensibilités de l’Assemblée, NUPES, LR, MODEM, RN, Renaissance…Une opportunité s’est pourtant présentée lorsque les RN ont proposé de voter une motion de censure à laquelle la NUPES, hostile au projet de loi, aurait dû souscrire. Il n’en n’a rien été car le tirage au sort lui a été défavorable. A quoi cela tient le vote d’une loi ! Et les députés se sont enfoncés dans des pitreries dont je vous fais grâce qui n’ont rien apporté aux débats si ce n’est consternation et affliction.
Côté Sénat que Charles De Gaulle appelait «le Machin» c’est dire le peu de considération qu’il lui portait, composé d’une majorités de LR, le peuple n’avait pas plus à attendre. Ces messieurs dames – une majorité de notables élus au suffrage indirect – constituant une assemblé de « vieux » que certains assimilent à un EHPAD luxueux, ne pouvaient que voter le report des cotisations à 64 ans. Quant à la suppression des régimes spéciaux, ils n’ont pas hésité un instant oubliant curieusement ceux des marins (27 580 cotisants), de l’Opéra de Paris (1 807 cotisants) et de la Comédie Française (346 cotisants). Les sénateurs dans leur grande sagesse ont maintenu aussi les régimes autonomes des professions libérales et les régimes agricoles. Excellente idée quand on sait qu’ils disposent eux-mêmes d’un régime spécial qu’ils qualifient par pudeur d’autonome, lequel leur est très, très avantageux. Charité bien ordonnée commence par soi-même. On a pu le vérifier une nouvelle fois (2).
Maintenant que va-t-il se passer ? Le projet de loi modifié et adopté (ou pas) par les sénateurs va passer le 15 mars 2023 devant une Commission mixte paritaire (CMP) composée de 7 députés et 7 sénateurs qui vont tenter de se mettre d’accord pour adopter le projet définitivement. A défaut de consensus, la loi devra repasser devant l’Assemblée nationale. Et là, le peuple peut encore nourrir quelques espoirs. En revanche, si la CMP avait la mauvaise idée d’adopter le projet, le pays vivrait, après le rejet du référendum de 2005 par un artifice Sarkoziste, une nouvelle crise démocratique à l’issue incertaine et s’en remettrait difficilement.
Cet échec consacrerait l’impuissance des syndicats, la trahison des Représentants du peuple sourds aux protestations de la rue, la confirmation de l’inutilité du Sénat, le totalitarisme des gouvernants aux ordres de Bruxelles (et de ses lobbyistes), la fin des référendums ainsi que celle de la crédibilité des journalistes qui ont fait preuve de beaucoup de légèreté dans le traitement de l’information (souvenez-vous, ils avaient annoncé la retraite pour tout le monde à 1200 € même pour les anciennes pensions !).
Délivrés de toute forme d’opposition, nos dirigeants auraient alors toute latitude pour gouverner dans l’outrance.
Comment en est-on arrivés là ? Parce qu’on les a laissés faire (Michel Murphy).
(1) Quand Olivier Dussopt était opposé au passage du report de l’âge de la retraite de 60 à 63 ans. Très à l’aise, il était convaincu à l’époque que le gouvernement, que représentait Eric Woerth, pouvait trouver des ressources financières auprès du Capital. On ne rit pas !
(2) On apprend ce vendredi 10 mars 2023 à midi que les sénateurs, grâce à un artifice législatif (un certain article 44.3) vont adopter l’ensemble des articles de la réforme par… un seul vote. Voilà une efficacité surprenante de la part de gens réputés pour leur lenteur ! Affaire rapidement classée donc et retour possible dans leur circonscription pour le Week-end… si les grévistes n’y font pas obstacle. 🙂
Sources : Internet – https://qqcitations.com/citation/107218 – https://www.businessbourse.com/2023/01/07/reforme-des-retraites-mensonges-et-embrouilles-de-la-macronie/ – https://www.boursorama.com/actualite-economique/actualites/retraites-macron-s-en-prend-aux-oppositions-pres-de-11-000-amendements-encore-a-examiner-799727f34d719476390f6a6e11b1a84f – https://www.slate.fr/story/172224/startup-nation-referendum-macron-contradiction – https://www.pinterest.fr/pin/716283515731833421/ – Cnews.