Simplification administrative : un vieux plat réchauffé

Photo : Man (Internet)

Parmi les vieilles recettes que les gouvernants réinscrivent régulièrement sur la carte de leurs promesses de réformes, il en est une qui tient une place de choix et qui bien sûr n’est jamais conduite à son terme. Il s’agit de l’allègement des procédures administratives. Comme beaucoup d’autres mesures annoncées (RMI, RSA, RSI, R…) cette réforme connait au fil du temps une succession d’appellations originales qui traduit à la fois leur grande imagination pour renommer le même plat et leur impuissance à traiter les problèmes en profondeur.

Le dernier en date qui s’y est collé est notre très impopulaire Président qui nous avait annoncé un grand “Choc de simplification . C’était en janvier 2013. Deux hommes, Thierry Mandon et Guillaume Poitrinal s’y sont attelés. Ils n’ont découvert que 350 circulaires obsolètes et…leur tâche s’est brusquement interrompue, chacun ayant été appelé à d’autres fonctions plus importantes.

Avant notre Président, en 30 ans, une pléiade de premiers ministres et ministres se sont penchés (sans tomber) sur la question avec le même taux de réussite :

– En 1983 Pierre Maurois a créé une Cosiform (Commission pour la simplification des formalités).

– En 1995 Edouard Balladur la remplace par le Ciré (Comité interministériel à la réforme de l’Etat).

– Lui succède le Commissariat à la réforme de l’Etat (Cré).

– Ce dernier est remplacé par la Diré (Délégation interministérielle à la réforme de l’Etat).

– En 1998 c’est au tour de Lionel Jospin d’inventer la Cosa (Commission pour la simplification administrative).

– En 2001 les sénateurs entre à leur tour dans la course. Ils proposent de créer une sorte de Conseil d’Etat qui validerait après le vrai Conseil d’Etat toutes les lois mais uniquement sur la forme !

– En 2002 Jean-Pierre Raffarin reprend le flambeau. Il claironne :”La première mission de mon gouvernement sera de simplifier la vie des français” On l’a cru tout en craignant pour les autres missions.

– Un an après, M. Raffarin n’oublie pas sa mission première, et créée d’un coup 3 entités. Une DMGPSE (Délégation à la modernisation de la gestion publique des structures de l’Etat). Une Dusa (délégation aux usagers et aux simplifications administratives) qui remplace la Cosa. Et, dans la foulée une Adae (Agence pour le développement de l’administration électronique).

– En 2005 Dominique de Villepin créée une DGME (Direction générale de la modernisation de l’Etat).

– Dès son arrivée, M. Sarkozy a pour grand chantier la Revue générale des politiques publiques (RGPP).

– A la fin de son mandat, il crée le Secrétariat général pour la modernisation de l’action publique.

– Plus tard, la DGME – devenue entre temps Dimap (direction interministérielle pour la modernisation de l’action publique) et la Disic (Direction interministérielle des systèmes d’information et de communication) fusionneront.

Michel Sapin, grand ami de F. Hollande, a été aussi, en son temps, un modernisateur. En 2001 il présidait les réunions du Comité d’orientation pour la simplification du langage administratif.

Tous ces empilements de sigles ont parait-il le mérite d’amuser les experts de l’OCDE. Pour les français, ils s’apparentent davantage à de l’enfumage organisé qu’à une réelle volonté d’améliorer les choses. La preuve (1) par les chiffres :

– En 1991 il y avait 7.500 lois et 100.000 décrets.

– En 2015 le nombre de lois est passé à 18.000 et celui des décrets à… 400.000 !

Vivement 2017 pour l’annonce enfin d’un Vcsfa  (véritable choc de simplification des formalités administratives) !

 

(1) Extraits de l’excellent ouvrage de Sophie COIGNARD et Romain GUBERT “Ca tiendra bien jusqu’en 2017… chez Albin Michel.

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  1. “Il y a toutes sortes de corps d’inspection, dont je me demande bien ce qu’ils inspectent. Si on faisait le recensement de tous les fonctionnaires, service par service, je suis persuadé qu’on en trouverait beaucoup dont personne ne pourrait dire à quoi ils servent. Il y a dans la fonction publique trop d’avantages, trop d’honneurs, trop d’effectifs.” Charles de Gaulle, cité par Alain Peyrefitte, dans “C’était De Gaulle – vol.2″, p. 218-219, livre de poche, éditions de Fallois / Fayard, 1994……..Depuis cette époque, le nombre de fonctionnaires a doublé, quant à la simplification : l’art est dans l’exécution…