BREXIT – Tout ça pour ça !

Photo : http://www.linternaute.com/actualite/politique/1279823-brexit-definition-date-du-referendum-consequences/

Après avoir entretenu un suspens insoutenable pendant toute la semaine dernière à propos du maintien de la Grand-Bretagne dans l’union européenne, les médias se sont brutalement calmés ce week-end et sont restés discrets sur les avantages (modestes disent-ils) obtenus vendredi par Mister Cameron lors de ses négociations “marathon” (1) avec les chefs d’Etat européens.

Il est vrai que l’actualité ne manque pas de sujets brûlants (le conflit syrien, l’évacuation de la “jungle” de Calais, le futur Code du travail, la dégressivité des indemnités chômage, le voyage préélectoral de M. Hollande en Polynésie etc.) et que les médias d’une manière générale n’aiment pas s’appesantir sur les questions techniques. Ce ne sont pas, à mon avis, des raisons suffisantes pour escamoter les sujets; c’est pourquoi il me parait opportun de revenir sur les” modestes” acquis du sieur Cameron, très remonté avant que les négociations ne s’engagent.

Au final qu’a-t-il obtenu pour qu’il prône maintenant le maintien de son pays dans l’Union européenne ? J’ai prospecté dans les médias à la recherche de ses acquis et je dois reconnaître que ma pêche n’a pas été fructueuse. Quelques amis m’ont adressé des liens intéressants mais dans l’ensemble la Presse s’est limitée à des généralités et des hypothèses comme si elle estimait que nous n’étions pas en mesure de comprendre ou qu’il était préférable de rester discrète ou encore tout simplement, comme le reconnait le journal 20 minutes, qu’il n’était pas aisé d’analyser des acquis “tournés dans un langage diplomatique ambigu”. Du côté du quotidien Ouest France du 22 février l’éditorial de M. Lequesne, professeur à Sciences Po Paris, ne m’a pas éclairé davantage.

Voici ce j’ai retenu de cet imbroglio diplomatique qui a mis la Presse en émoi: des arrangements ont été évoqués mais les accords n’ont porté que sur la volonté de trouver des solutions… d’ici le prochain sommet de février ! On ne rit pas ! Bien sûr des dispositions ont été envisagées, mais ce qui importait apparemment c’était de réfléchir à ce qui allait être concrétisé. Parmi les points abordés :

– Restrictions des mesures sociales en faveur des migrants européens (Pologne surtout, et pays de l’Europe de l’Est). M. Cameron veut ralentir leur afflux en Grand-Bretagne en imposant des quotas et en supprimant momentanément leurs avantages sociaux (allocations logement et allocations familiales). Actuellement, ces migrants touchent des allocations pour leurs enfants restés au pays. M. Cameron souhaiterait suspendre ces allocations pendant 13 ans. L’accord portera certainement sur moins d’années. On parle d’un moratoire de 4 ans. Cette disposition remet en cause la libre circulation des personnes et l’équité entre citoyens européens. Sera-t-elle bafouée ?

– La possibilité pour des parlements nationaux (combien ?) de bloquer la législation européenne. Les décisions étant prises actuellement à l’unanimité des états. M. Cameron souhaiterait échapper en quelque sorte à l’engagement d’une “union toujours plus étroite”. Ce genre de disposition nécessite une révision des traités et de la Constitution, elle aura donc du mal à aboutir.

– Concernant l’euro M. Cameron souhaite que la Grand-Bretagne dispose d’un droit de véto sur les décisions bancaires et conserve les prérogatives de la City qui est la place financière de Londres. En d’autre termes, il souhaite la reconnaissance de plusieurs monnaies en Europe pour protéger la livre Sterling et pour ne pas être victime de discriminations et des crises de la zone euro. Le beurre et l’argent du beurre en quelque sorte. Sur ce point particulier il lui a été répondu que les institutions européennes “faciliteront la coexistence entre plusieurs perspectives”. On ne peut être plus clair.

– Enfin M. Cameron souhaitait qu’un accord obligatoire soit conclu à l’issu des négociations. Il n’a pas eu satisfaction sur ce point.

La Presse n’en dit pas plus. Il n’y avait donc pas dans l’immédiat de quoi en faire tout un plat, susciter les jubilations de M. Cameron et mettre le pays en émoi (à moins qu’on ne nous ait pas tout dit !). Il faudra maintenant attendre le prochain sommet pour en savoir davantage. L’Europe est un projet de longue haleine qui n’a pas encore abordé concrètement le volet social. On est encore loin du bout et des crises; il y en aura certainement beaucoup d’autres !

(1) Le terme de “marathon” est souvent associé par la Presse aux négociations européennes. Ce terme a pour but de préciser que les tractations sont longues. Il me parait superfétatoire dans la mesure où elles sont sont généralement courtes quand on connait l’importance des enjeux débattus, quand on sait par ailleurs que les sujets abordés sont connus à l’avance et que les positions des états sont préalablement arrêtées. Elles laissent place la plupart du temps à des marchandages qui ne durent qu’un jour ou deux et, par bonheur, se terminent la veille d’un Week-end. La vie de famille des participants est ainsi préservée, et c’est très bien pour eux.

 

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